Vive l’Allemagne !

Alain Minc

Informations générales

160 pages
Grasset
Octobre 2013

Biographie de l’auteur

Alain Minc est un conseiller politique et économique, essayiste et dirigeant d’entreprise.

Ingénieur diplômé de l’École nationale supérieure des mines de Paris (promo 1971), diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris (promo 1971) puis de l’École nationale d’administration (promo 1975), Alain Minc intègre l’Inspection générale des Finances puis démissionne de son corps pour rejoindre Saint-Gobain en 1979. Administrateur de nombreuses sociétés, il traite d’économie comme du discours de communication avec sa société AM conseil.

Présentation de l’éditeur

« L’Allemagne est désormais, à mes yeux, le pays le plus démocratique et le plus sain d’Europe. Incroyable renversement historique! Mais prisonniers de leur pessimisme et de leur anti-germanisme primaire, les Français croient le succès allemand irréversible et menaçant. Rien n’est plus faux. Cette Allemagne qui va connaître économiquement un relatif déclin, n’aspire malheureusement qu’à être une « grosse Suisse » prospère et paisible. C’est pour nous, Français, une tâche paradoxale et noble que de la pousser à ne pas être un acteur édenté mais à exercer le magistère tempéré qui lui revient.»
Alain Minc

Extraits

Peuple-nation et non Etat-nation

« Pour des esprits façonnés par cette tradition, l’Allemagne demeure un mystère. C’est un peuple-nation. Aussi n’est-il enserré dans aucune frontière naturelle. Les Pyrénées, les Alpes, la rive gauche du Rhin, fut-elle atteinte, constituent des frontières naturelles pour la France comme la mer pour la Grande-Bretagne. L’Allemagne n’a connu, elle, que des frontières fluctuantes : à l’ouest certes mais plus encore à l’est, au gré des conflits avec le monde slave et l’Empire ottoman. Frontières, qui plus est, si longtemps déconnectées du système politique. »

p.12

« Avec la chute du Mur, la question allemande change de nature. Le risque d’aliénation vis-à-vis des Soviétiques disparaît, alors qu’apparaît un choix beaucoup plus traditionnel : quelle place pour l’Allemagne au centre de l’Europe ? Il était, à l’époque, fascinant d’écouter les différences de tonalité dans les discours des trois principaux dirigeants de la RFA. Né en Prusse orientale, le président de la République, Richard von Weizsäcker, donnait une importance primordiale à la qualité des relations avec l’Est, et en particulier avec la Russie. Le ministre des Affaires étrangères, Hans-Dietrich Genscher, était saxon, et son cœur battait pour la Mitteleuropa. Quant à Kohl, rhénan, il affirmait la nécessité de maintenir l’ancrage européen de la nouvelle Allemagne à l’Ouest ? C’est toute la diversité allemande qui se manifestait dans ces nuances. Une Allemagne enserrée entre le Rhin et l’Oder ne pouvait voir l’Europe comme l’Allemagne de Bonn, coincée entre le même Rhin et l’Elbe. 

Même si elle n’a jamais été énoncée aussi crûment, l’alternative était limpide. Soit une Allemagne toujours exemplairement démocratique devenue le centre de l’Europe, mais devenue le centre de l’Europe, pont entre l’Ouest et l’Est, cœur d’une Europe élargie avec un grand marché allant de Brest à Brest-Litovsk, aux structures faibles. C’est une sympathique Europe allemande qui se serait progressivement mise en place. Soit une Allemagne, identique en termes démocratiques, mais qui renforce son ancrage dans l’Union européenne, continue à faire de la construction communautaire sa boussole, et entraîne vers l’Ouest les anciennes démocraties populaires. C’est cette voie-là que les élites allemandes ont choisie. » p. 88-89

Critiques

« L’ouvrage d’Alain Minc est comme une arme de poing ou plus exactement, un fleuret non moucheté. Il permet les mouvements rapides, solidement en main, sans fioriture tout en élégance. Efficace avec brio, il atteint son objectif en moins de temps qu’il ne faut pour le lire. […]

Vive l’Allemagne ! est un faux titre. Ce n’est pas un ouvrage qui se termine par un vibrant appel aux peuples d’Europe à devenir allemands. Au vrai sens de la formule, «que vive l’Allemagne ! » est une revendication, un devoir, parce que l’Europe sans elle ne serait pas grand-chose et que l’Allemagne sans l’Europe risquerait de s’offrir un avenir fort sombre. C’est la conclusion ! […]

Avant d’en arriver à de pareilles conclusions, Alain Minc présente l’Allemagne et son histoire ancienne et récente […] L’Allemagne, Homme malade de l’Europe en 2002 selon « l’Economist », s’est transformée en une fantastique machine à succès économique. L’avenir n’est pas rose cependant : la démographie va ronger progressivement les beaux succès allemands. Alain Minc n’est pas tendre avec le futur allemand et l’attitude allemande face aux grands défis mondiaux politiques, économiques et humains. C’est une belle qualité de ce livre. On comprend que le « Vive l’Allemagne » a dans l’esprit de l’auteur le vrai sens qu’on a  proposé plus haut. « il faut qu’elle vive l’Allemagne », mais pas toute seule, dans un illusoire confort de « Grosse Suisse » qui reflèterait le désir profond d’une population qui ne veut pas qu’on la bouscule et, progressivement, se renferme dans l’individualisme et le repli culturel. […] 

Alain Minc conclut donc sur un appel à une Allemagne plus impliquée, plus responsable. Il est convaincu que la France peut et doit jouer un rôle clef dans cette mobilisation de l’Allemagne pour retrouver l’élan fort et vital de la construction européenne. […] 

Des critiques à ce livre : très orienté sur la mise en valeur d’une Allemagne modèle, sereine, tranquille et ne demandant plus rien à personne, Alain Minc, néglige quelques aspects moins sympathiques de l’essor et de la réussite de notre grand voisin et ami. […] Bien sûr, ce livre n’est pas une somme, ni une thèse, ni un ouvrage didactique… mais, s’il est vrai que nous avons tous, européens, intérêt à ce que Vive l’Allemagne, nous avons aussi intérêt à ne pas nous laisser aveugler par une Allemagne rêvée. »

Pascal Ordonneau, Les Echos, 01/11/2013